L’exigence d’intérêt général

L’exigence d’intérêt général est une condition essentielle de l’admission des publications sur les registres de la CPPAP. Elle contribue de façon centrale à la définition de la notion de publication de presse et permet d’exclure certains types de supports de l’aide publique.

Les articles D 18 du code des postes et télécommunications (CPCE) et 72 de l’annexe III du code général des impôts (CGI) précisent que :

Les avantages fiscaux et postaux sont accordés aux journaux et écrits périodiques présentant « un caractère d’intérêt général quant à la diffusion de la pensée : instruction, éducation, information, récréation du public » ainsi qu’un « apport éditorial significatif ».

L’intérêt général est la première condition énumérée par les articles qui régissent le régime économique de la presse.

La condition d’intérêt général est un des fondements de l’attribution d’une aide à la presse, celle-ci est historiquement aidée pour le rôle qu’elle joue dans l’information du citoyen, Ainsi, le contenu d’une publication doit être le fruit d’un réel travail éditorial.

Il s’agit, en outre, d’une notion sur laquelle s’appuient de nombreux raisonnements juridiques confirmés par le Conseil d’Etat.

Les trois grands types de contrôle fondés sur l’intérêt général :

La CPPAP a progressivement dégagé une notion de défaut d’intérêt général sur laquelle repose trois types principaux de refus.

Le défaut d’intérêt général au regard des potentielles atteintes à l’ordre public (art. D18 1° et 7° CPCE, art. 72 1° et 8° ann. III CGI)

Ne peuvent être admises les publications dont l’objet présente un défaut d’intérêt général au regard des sujets abordés et du traitement éditorial opéré. Ex. : atteinte à la protection de la santé publique, atteinte à la dignité humaine, incitation à des comportements illicites, contenus à caractère pornographique…

L’insuffisance de contenu d’intérêt général

Apport éditorial significatif

Celui-ci est apprécié globalement en lien avec l’exigence d’un apport éditorial significatif. La publication doit présenter les caractéristiques exigées pour être assimilable à une publication de presse

La présence marginale de quelques articles à caractère littéraire ou artistique ainsi que la circonstance que ladite publication aurait préalablement bénéficié de diverses décisions administratives favorables ne sauraient suffire à caractériser l’intérêt général d’une publication.

Paris Magazine - CE - 21-12-1960

Le contenu d’intérêt général est également mesuré quantitativement ; au regard de la lecture combinée des 1° et 5° des articles D18 CPCE et 72 annexe III CGI, toute publication doit consacrer au maximum 2/3 de sa pagination à la publicité et au minimum 1/3 à du contenu dit d’intérêt général. Cette qualification est appréciée au sens large comme tout contenu (écrit ou photo) ne constituant ni de la publicité ni un genre éditorial exclu (modèles, cotations…).

Jurisprudence
Une publication qui a pour objet de mettre à disposition de ses lecteurs la jurisprudence des tribunaux judiciaires et des juridictions administratives, et de publier des articles et des notes de juristes réputés ainsi que des textes législatifs et réglementaires, contribue à assurer la diffusion de la science juridique et présente un caractère d’intérêt général quant à la diffusion de la pensée.

Le Bulletin Legislatif - CE - 22.11.1948 Editions Dalloz 
Ne présente pas un défaut d’intérêt général une publication dont le contenu porte essentiellement sur la vie interne d’un organisme public.

Le bulletin officiel du CNRS - CE – 27-05-94

Majorité de contenu éditorial original en lien avec l’actualité

Les publications comprenant plus de 50 % de contenus dénués de lien avec l’actualité tels que des nouvelles ou des récits sont considérées comme dépourvues d’intérêt général, non assimilables à des publications ayant pour objet principal d’offrir un apport éditorial significatif en lien avec l’actualité au sens du chapeau des articles D18 CPCE et 72 ann.III CGI. Sont en particulier identifiés à ce titre :

– les nouvelles, récits et témoignages, romans-photos ;

– les partitions musicales ;

– les prévisions astrologiques et horoscopes ;

– les listes, tables et notices généalogiques ;

– les annonces de concours.

De même, pour être qualifié de publication de presse, un titre ne doit pas comporter plus de 50 % d’extraits d’autres titres de presse. A défaut, ils sont assimilables à des panoramas de presse non éligibles au bénéfice du régime économique de la presse.

Un contenu majoritairement consacré à des genres éditoriaux exclus qui, de par leur nature, sont dépourvus d’intérêt général :

Guides, catalogues, feuilles d’annonces (art. D18 6°a) CPCE, art. 72 6°a) ann. III CGI)

Sont exclues les publications assimilables à des guides ou répertoires ainsi que celles comportant plus de 50 % d’annonces ou d’annonces judiciaires et légales.

Jurisprudence
La publication qui consacre l’essentiel de sa surface à la diffusion d’annonces de programmes lancés par les communautés européennes ne présente pas de caractère d’intérêt général quant à la diffusion de la pensée.

Le Leader - CE – 28-12-92
Une publication dont l’essentiel de la surface est consacré à des notices de présentation de monographies de villes et villages de France avec de surcroît la présence d’un bulletin de commande permettant aux lecteurs d’acquérir les livres présentés est assimilable à une feuille d’annonce et ne peut pas conséquent pas bénéficier du régime d’aide à la presse.

Histoire locale - CE – 25-11-98
La publication qui consacre l’essentielle part de sa surface à la diffusion d’appel d’offres lancés par l’Union européenne est assimilable à une feuille d’annonces, au sens des articles 72 CGI et D-18 CPCE 6° a) et ne présente pas le caractère d’intérêt général quant à la diffusion de pensée, au sens des articles 72 CGI et D-18 CPCE 1°.

Lettre européenne des travaux souterrains - CE – 10-11-99
A l’inverse, n’est pas assimilable à un guide une publication comportant de nombreux commentaires et références de la législation fiscale ayant pour objet d’aider les contribuables à remplir leur déclaration d’impôt.

Intérêts privés - CE – 26-07-07
Il en va de même pour la publication éditée par une association reconnue d’utilité publique se composant d’articles sur des livres destinés à la jeunesse parus récemment et dont l’objet est celui de proposer une critique littéraire de ces œuvres destinée notamment aux professionnels de la lecture publique et aux enseignants, non assimilable à un guide.

Livres jeunes aujourd’hui - CE – 25-05-05

Modèles, jeux, programmes et cotations (art. D18 6°d) CPCE, art. 72 6°d) ann. III CGI)

Sont exclues les publications comportant plus de 50 % de modèles ou jeux, ou des programmes (liste d’événements avec indication de la date et du lieu). De même, une publication ne peut comporter plus de 50 % de tableaux, listes, cotations ou pronostics sportifs. Des règles particulières ont été édictées par la commission s’agissant de la presse hippique.

Jurisprudence
Programmes : 
Une publication, supplément d’une revue, dont au moins la moitié de la surface est consacrée à la diffusion d’annonces de programmes des manifestations culturelles organisées dans le département, ne présente pas un caractère d’intérêt général quant à la diffusion de la pensée.

Vivre en Val d’Oise - Supplément Lumières - CE – 30-03-07
Presse hippique : 
Bien que comportant quelques informations générales sur l’équitation ou le sport hippique, les publications ont pour but essentiel de fournir aux lecteurs des renseignements de nature à leur permettre de réaliser des gains en les aidant à supputer les chances qu’auront les chevaux partant dans différentes courses d’obtenir un bon classement et à établir leurs paris en fonction de cette sélection. Dès lors, les trois publications ont plus de 50 % de pronostics et n’atteignent pas le tiers d’intérêt général.

Ouest Turf - CE - 17-01-90

Trot Paris Province - CE - 17-01-90

La lettre confidentielle des courses - CE - 17-01-90

Publications considérées comme instrument de publicité ou communication (art. D18 6°c) CPCE, art. 72 6°c) ann. III CGI)

La notion d’intérêt général exige une certaine universalité du propos et qu’elle ne soit pas dédiée exclusivement à une marque ou une entreprise (ex : marque automobile, club de football, émission de télévision…). Ce critère est souvent assorti d’un refus sur le fondement du 6°c (accessoire promotion commerciale).


Vie interne d’un groupement ou association (art. D18 6°e) CPCE, art. 72 6°e) ann. III CGI)

La publication ne doit pas être majoritairement consacrée à la vie interne du groupement ou de l’association éditrice.